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Ecrans & toiles

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Un café au paradis

Dimanche, c’est journée ciné. Je suis allée voir Le Concert de Radu Mihaileanu qui est une vraie réussite. Un ancien chef d’orchestre condamné à faire le ménage depuis 30 ans se lance le pari fou de jouer à Paris avec les membres de son Bolchoi « historique ». Une entreprise certes musicale mais surtout une épopée entre théâtre du Chatelet et siège du PC à Paris. Je ne suis pas une grande fan de Mélanie Laurent mais elle m’a agréablement surprise. Les autres comédiens, au premier rang desquels Aleksei Guskov sont à la fois drôles et touchants. La musique de Tchaikovski accompagne le tout, bref, un bon moment de cinéma.

Maintenant, le plus important, il faut préciser que j’étais dans de (très) bonnes dispositions dès le début de la projection. Celle-ci avait été précédée par la diffusion de la dernière pub Nespresso. Dernière, on pourrait presque dire « ultime » puisqu’il ne s’agit de rien d’autre que de la mise en scène du décès brutal (une chute de piano ne saurait être qualifiée autrement) de notre idole et je parle ici autant au nom de Mademoiselle Mécanique que de Lady Penny. L’ami George se retrouve ainsi ad patres, devant argumenter, comme beaucoup doivent essayer dans la même situation, pour être certain qu’il ne s’agisse pas d’une regrettable erreur de calendrier. En face, un John Malkovich excellentissime, qui malgré la certitude de tenir à jour ses registres d’entrées au Paradis, n’est pas contre un petit arrangement entre amis…

Encore une fois, un presque court-métrage qui régale le public. Oui à George, oui à John, oui au violon de Tchaikovski, oui au piano de George et oui je suis super bon public quand il s’agit de môssieur Clooney. Que voulez vous, on ne se refait pas.
Mais surtout, le meilleur café du monde dépend de la personne avec qui on le savoure.

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Un western français

Mercredi 25 novembre, sortie d’Une affaire d’Etat, le dernier film d’Eric Valette. Celui-ci était jusqu’ici plus versé dans le film fantastique, voire d’horreur. Souvenons nous de Maléfique (2003), avec mon chouchou Clovis Cornillac, ou encore de One missed call (2008), un thriller pur jus. Il prend ici le parti d’adapter le roman de Dominique Manotti, Nos fantastiques années tout en disposant d’un budget serré. L’affaire n’est pas aisée mais il se lance.
Le réalisateur relève un nouveau défi, revenir au film politique, version thriller (encore). Il reconnaît lui-même s’inspirer d’un I… comme Icare, très années 80’. Sur fond d’actu, le hasard fait parfois étonnement bien les choses, Valette nous entraîne dans une obscure affaire de ventes d’armes, de réseaux d’influences où call-girls et associations pseudo-humanitaires couvrent des échanges d’armes sur fond d’embargo. Qui a dit Angolagate ? Si, je vous ai entendus mais vous n’êtes pas les seuls à y avoir pensé, rassurez vous.

Le bras armé de cet imbroglio politico-financier, Michel Fernandez – Thierry Frémont est un chasseur de primes des temps modernes, qui loue ses services de porte-flingue patenté à Victor Bornand – André Dussolier, homme de main fidèle du Président. Sauf lorsque les circonstances le contraignent à changer d’employeur. Un tueur à gages qui se découvre une conscience à mesure que la mission dérape, si bien qu’une forme de sympathie nous amène à porter un jugement moins radical sur ses activités coupables. Il a beau dézinguer à tout va, le lascar conserve quelques principes qui d’ailleurs, ne lui sauvent pas la mise. Un personnage attachant, qui l’eut cru ?

Dussolier est économe. En paroles et en gestes. Et ce jeu d’acteur minimaliste donne toute la force du personnage par une présence discrète mais centrale, efficace sans être écrasante. La petite main de la raison d’état, celui qui agit et finit seul. Une interprétation parfaite, au millimètre comme toujours mais je ne m’en lasse pas que voulez-vous.

Au milieu de tous ces mensonges, sexe et vidéos, Nora Chayd – Rachida Brakni, jeune lieutenant pétrie de principes qui apprend sur le terrain, à la dure, très dure. La méthode à employer n’est pas celle enseignée à l’école de police. Que faire devant les consignes du service ? Se résigner, résister ? Une scène en particulier : le face à face Nora/Victor. Deux mondes qui se rencontrent, un même désir de loyauté pour des causes qui s’opposent, le passé face à l’avenir. Courte mais terriblement efficace, encore.


Lors de l’avant-première, Eric Valette a évoqué le thriller politique mais également le western. Et il a raison. Pas de poussière, de colt ou de cheval, certes mais certains plans pourraient bien être empruntés à Sergio Leone. Une ambiance, une tension, comme dans ces plans où le silence de Clint Esatwood ou John Wayne disait tout. Il a également évoqué la difficulté d’un budget restreint et d’un tournage économe lui aussi, comme le jeu d’acteurs. La scène de nuit qui se déroule à Montmartre a été tournée dans des conditions difficiles mais est néanmoins parfaitement maîtrisée. Comme quoi quand on veut faire du western à la française, pas besoin de sommes délirantes ou de partir se fourvoyer à Daisy Town. Le talent suffit. Bravo, tout simplement.
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Unlucky Luke

A peine remise de ma demi-déception du Petit Nicolas, je me suis laissée convaincre de laisser sa chance à Jean Dujardin et à son Lucky Luke. En ces temps d’adaptations industrielles de BD, j’espérais le miracle d’une bonne surprise, bien que les critiques n’aient pas manqué de l’égratigner. J’ai donc payé pour voir et j’ai accompagné mes mini-moi voir l’homme qui tire plus vite que son ombre en chair et en os.

La partie semblait difficile.
Il y a certes une belle paire de vilains. Daniel Prévôt est un Pat Poker convaincant, cynique juste à point, mais avouons que l’exercice lui est familier. Coop’, gouverneur de Californie et accessoirement parrain de Luke, est interprété par un Jean-François Balmer très en forme qui tire les ficelles de la (pseudo) intrigue.

On trouve également un brelan de soi-disant bandits. Jesse James / Melvil Poupaud ne ferait pas peur à grand monde et cite Othello et McBeth en se roulant dans la poussière, mouais. Heureusement que Shakespeare ne voit ni n’entend le massacre. Billy the Kid / Michael Youn collectionne les sucettes et devrait retourner à son mégaphone qui, lui, nous faisait rire. Enfin Calamity Sylvie Testud Jane se fourvoie en reine de la carabine, bien loin de sa performance en Françoise Sagan. Bref, les pires gâchettes de l’Ouest ressemblent à de vulgaires pieds-tendres. Rantanplan et les Dalton auraient-ils bien fait de passer leur tour ?

Le tapis vert, pardon le paysage ocre de l’Utah, ainsi que les décors sont la véritable réussite du film. Un saloon, un croquemort plus vrai que nature, un train présidentiel « Rail Force One » (LA seule trouvaille du film), une diligence, du goudron et des plumes : tout y est. Heureusement que l’esthétique est soignée, offrant au spectateur une raison de ne pas (trop) regretter d’avoir misé sur le film.


Enfin, last but not least, l’as de trèfle de l’affaire, Lucky Luke himself, peu chanceux sur ce coup là… Car c’est là que ça coince le plus. Dujardin excelle en Loulou évidemment. OSS 117 lui va comme un gant, ainsi que Ca$h, dans lesquels le charme à la française n’est pas un vain mot. Les rôles plus noirs, comme dans Contre-enquête où il joue un flic désespéré lui ont déjà donné l’occasion de montrer que les Nous C Nous sont loin (quoique pas tant que ça puisque Bruno Salomone prête sa voix à Jolly Jumper). Reviens Hubert Bonnisseur de la Bath !

Un Lucky Luke agaçant, misogyne, égoïste, voire lâche n’est pas le personnage de la BD de mon enfance. Dujardin surjoue, parvenant à rendre Luke presque antipathique, un comble. Les mini-moi n’ont pas été plus convaincues que les (rares) adultes présents dans la salle, c’est dire…
Même la reine de cœur, Alexandra Lamy-Dujardin, interprète une chanteuse de saloon d’une rare mièvrerie, voire inconsistance. Dommage…

Bref, un Lucky Luke impair, à passer, car n’est pas Clint Eastwood qui veut.

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Roy Lichtenstein, Pop Artist

D’Andy Warhol à Paris ce printemps, à la faculté de médecine de Düsseldorf il y a quelques jours, mon intérêt pour le Pop Art se nourrit régulièrement. En sortant du Grand Palais, je pensais à Catherine Ringer en disant Oui à Andy. Les panneaux Brushstokes entraperçus dernièrement (ci-dessous, une des rares images disponibles, empruntée à la Roy Lichtenstein Foundation) m’ont rappelé que le maître Warhol n’était pas seul sur la planète Pop Art.

J’ai évoqué rapidement Roy Lichtenstein (1923-1997) et il est temps de rendre à César ce qui est à Jules. En effet, dès 1961, l’artiste américain réalise son premier grand tableau suite à un défi que lui a lancé son fiston. Celui était persuadé que Papa ne ferait pas un aussi beau Mickey que dans la bande dessinée. Comme quoi, l’influence de nos chères têtes blondes-brunes-châtains ou autres n’est jamais à négliger… Bref, un Mickey plus loin, une carrière était définitivement née.

Ses thèmes de prédilection sont la publicité, les comics ou les personnages inspirés (entre autres) de Marylin Monroe ou de super héros. Une de ses toiles les plus célèbres, le Whaam! (1963).

Le Pop Art ne passe pas de mode, preuve en est la dernière campagne des cosmétiques Kiehl’s, dont les visuels reprennent les codes de Lichtenstein.


Et, clin d’oeil à miss Méca’, la blonde girl with hair ribbon (1965) est déjà le sujet central d’une série « féminine »… Plus aucune hésitation pour se lancer !

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La Sain(t)e Victoire

Lundi 2 novembre, avant-première de La Sainte Victoire, le long métrage de François Favrat. A réception de l’invitation, c’est la curiosité qui m’a poussée à me laisser tenter. Songez, Jacquouille la fripouille opposée au héros du Serpent, ou encore Astérix « canal historique » face à Astérix « canal héréditaire », tout était possible.

Le pitch : un ancien gosse de cité, dont le seul rêve est de devenir « bourge », devient le coach d’un député en mal de mairie. A coups de sponsoring plus ou moins légal (pour ne pas dire super limite), il fait élire son poulain et se voit confronté aux aléas du renvoi d’ascenseur…

En fait, une très belle surprise. Xavier espère un petit (gros) merci mais n’est cependant pas un opportuniste sans morale aucune. Vincent (Clavier tout en mesure, inattendu et déroutant) ne veut pas « de ces méthodes là« , prône une « politique propre » et va jusqu’à refuser tout geste mal-interprétable. Il doit pourtant, malgré ses grands principes, se plier au jeu des influences politiques. Yacine, l’ami d’enfance écoeuré par le système, finit même par retrouver un semblant d’idéalisme. Là où on attend le bon, la brute et le pourri on s’aperçoit que rien n’est blanc ou noir, que chacun joue avec les cartes qu’on lui donne et doit parfois se coucher faute d’avoir la main.

Je craignais une énième comédie à grosses ficelles. La recette est plus complexe : on rit, certes, mais il y a du film politique ou du thriller. On n’est pas toujours tendre au pied de la Sainte Victoire et certaines méthodes font des clins d’oeil au grand banditisme d’Olivier Marchal. De même, on ne néglige pas l’histoire d’amour-impossible-mais-pas-tant-que-ça, french touch oblige.

Cornillac est excellent, comme souvent ; je pourrais presque dire toujours car je lui pardonne ses infimes erreurs de parcours tant il en a encore sous le pied pour la suite. Clavier se révèle touchant et agaçant avec sa candeur de député sincère (ça se dit ça ?) et ses refus du compromis qui l’amènent à la triste réalité qu’on est jamais si bien trahi que par les siens. Les seconds rôles sont meilleurs les uns que les autres, de Valérie Benguigui en écolo non-hystérique à Sami Bouajila en ami de toujours désabusé, en passant par Michel Aumont, just perfect dans l’ignominie et évoluent dans une mise en scène qui leur fait, à juste titre, la part belle.

« Seule la victoire est jolie » disait Michel Malinovsky à l’arrivée de la Route du Rhum en 1978. La victoire, oui, mais après, pour en faire quoi si on n’est pas libre ?

Le film sort le 2 décembre, courez y.
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A Neuilly c’est permis !

A trop tergiverser sur le choix du film, on arrive en retard au cinéma. Voilà comment je me suis retrouvée à choisir, en ultra-dernière minute, entre Le petit Nicolas et Neuilly sa Mère. Le premier ne m’ayant pas laissé un souvenir suffisamment impérissable pour une seconde couche, je me suis rabattue sur le second, sorti il y a déjà un moment, non sans un a priori. Encore un énième film sur l’opposition banlieue vs quartiers chics, mais maintenant que j’y suis…

Un démarrage un peu laborieux, qui s’amorce sur un monologue longuet, est chargé de nous expliquer comment et pourquoi Sami se retrouve propulsé à Neuilly sur Seine. Certes, on n’évite pas les passages obligés, les comparaisons alimentaires, vestimentaires ou de vocabulaires. Oui, l’intégration à Neuilly sur Seine, capitale du 9-2 ne s’avère pas aisée pour le gamin de la cité Ravel de Chalon. Oui, être le beur de service, estampillé Monoprix par des garnements fortunés, est des plus inconfortables. Mais le bonhomme s’en sort bien et, je vous rassure, finira par retrouver sa belle à la fin.

L’intérêt n’est pas là. Tout d’abord, le cousin Charles, s’avère un mini-Sarkozy (il a décidé de devenir Président de la République et puis c’est tout, na) extrêmement prometteur. La directrice de l’école Saint–Exupéry (Josiane Balasko, très en forme) martèle un « travailler plus pour réussir mieux » qui nous rappelle quelque chose. Pour ceux qui se risqueraient à l’oublier, on ne coupe pas sa salade avec son couteau (pour info, ça oxyde l’argenterie). En gros, ce Neuilly serait une espèce de Sarkozy-Land où chaque môme perçoit un manuel UMP au berceau… Au final on obtient une caricature, gentillette mais efficace, ponctuée des chansons de Carlita.

Cependant, si on y regarde de plus près, le scénario est truffé de clins d’œil que les moins de 25 ans ne peuvent pas connaître. Le best : une réplique de Charles, coincé à l’hôpital et qui chouine consciencieusement sur son pauvre petit sort : «je suis un looser, je suis comme Balladur». Derrière moi, deux jeunes filles qui s’esclaffaient devant chaque mot plus ou moins drôle et qui, devant cette réplique ont cet échange surréaliste : «Il a dit quoi ?» – «Je sais pas de quoi il parle, c’est même pas drôle». Ben oui, un clin d’oeil qui remonte à quelques années mais ceux qui l’ont vécu s’en souviennent…


Bref, pas le film de l’année mais un vrai bon moment de bonne humeur, des comédiens sympathiques et inspirés (dont Denis Podalydès, toujours excellent), un film pavé de bonnes intentions : pourquoi pas ?
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Le talentueux Mr Damon

1997, Will Hunting, dirigé par Gus Van Sant est un de mes coups de foudre cinéma. Non seulement, j’apprécie le film mais j’aime l’idée que deux copains acteurs, à défaut de trouver rôles à leur mesure, imaginent un scénario qui leur ramène un Oscar à moins de 30 ans.

Matt Damon et Ben Affleck, ou les aventures hollywoodiennes de deux gamins qui ne se quittent plus depuis leurs 10 ans. Ajoutons pour la petite histoire que le second sera vu au bras de la bomba latina Jennifer Lopez avant d’épouser Sydney Bristow (pardon, Jennifer Garner). C’était pour la note people

Mais concentrons nous sur Matt Damon. Après Le talentueux Mr Ripley (1998), il entre dans le clan des fidèles de Steven Soderbergh et tourne les Ocean’s Eleven, Twelve ou encore Thirteen (2001, 2004 et 2007) auprès de George C ou encore de Brad P. Il est également Jason Bourne dans les différentes « Peau » (qu’elles abritent Mémoire, Vengeance ou Mort en 2002, 2004 et 2007…).

Primo, le jeune homme est beau gosse, on n’oserait prétendre le contraire au risque de contredire le très bien renseigné magazine People qui le proclame « Homme le plus sexy du monde en 1997 ».
Ensuite, on le sait talentueux (son Oscar en témoigne, ainsi que le titre d’un de ses films), fidèle en amitié (avec Ben et ses camarades les arnaqueurs de Las Vegas), mari aimant, papa poule et bon acteur en général. Bref, il a tout pour lui…

2009, son dernier opus, The Informant, sous la direction du très prolifique Steven Soderbergh m’a laissée tout d’abord indécise, puis bluffée et enfin conquise.
Le pitch (minimaliste car une telle histoire ne se raconte pas sous peine de voir ma tête mise à prix) : un cadre loyal propose ses services au FBI pour dénoncer une escroquerie géante. Le film commence tranquillement, montrant comment, pourquoi, combien de temps dure l’observation. Au départ, je me suis demandé si l’ennui me guettait, si l’acteur était anesthésié du fait de sa conséquente surcharge pondérale ou si l’ami Soderbergh savait réellement où il voulait aller.

Mark Whitacre, qu’on qualifierait volontiers au départ de benêt intégral, s’avère très rapidement beaucoup plus torturé que prévu. Les tiroirs de l’intrigue s’ouvrent chacun à son tour dans une réalisation taillée au millimètre. Je ne raconterai pas la suite, mais là où on soupçonne l’anti-héros de naïveté compulsive, on se rend compte que celui qui a été manipulé dans l’affaire n’est pas celui qu’on croit. Bipolaire, peut-être, génial surement, en tous cas servi par un Matt Damon très en forme(s) dans une composition remarquable où on ne peut pas dire qu’il mise tout sur son physique. Une Oscarisation est à espérer…

Evidemment , le film ne fait pas l’unanimité et la critique l’égratigne parfois vigoureusement. De mon côté, je dirais que c’est une très belle réussite, un vrai « film politique » comme je les adore. Un mot encore, la dernière scène m’a laissé un peu le même goût que celle du sublime Usual Suspect (sorti en 1995, une référence ab-so-lue) avec Kevin Spacey, et surtout l’envie urgente de le revoir, c’est vous dire !