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Simone Veil

La vie...

Merci madame l’Académicienne

30 juin 2017, une grande dame nous a quittés. Merci madame Veil pour les combats que vous avez menés.
20 novembre 2008, madame Simone Veil est élue à l’Académie française (et cela dès le premier tour par 22 voix sur 29), pour occuper le siège de Pierre Messmer, mais avant lui de Jean Racine.
18 mars 2010, devant trois Présidents de la République, la désormais immortelle rejoint le club très fermé des Académiciennes, au côté de Jacqueline de Romilly, d’Hélène Carrère d’Encausse, de Florence Delay et d’Assia Djebar. Elle a pour l’occasion revêtu un habit vert signé Karl Lagerfeld pour Chanel et porte l’épée à la ceinture. Celle-ci porte sur la lame les devises de la France, «Liberté, Egalité, Fraternité» ainsi que celle de l’Europe, «Unie dans la diversité», mais également son numéro de déportée et le nom du camp d’extermination de Birkenau.

Simone Veil, 82 ans, magistrate, « femme préférée des Français », respectée par les politiques de droite comme de gauche, a été Ministre de la Santé en 1974 sous le gouvernement de Jacques Chirac. En 1975, elle fait voter la loi légalisant l’interruption volontaire de grossesse (IVG) au terme d’un difficile combat politique. Un grand pas pour la Femme, un grand pas pour l’Humanité. Elle préside le Parlement Européen de 1979 à 1982. Dans son discours de réception à l’Académie, elle cite un texte de Victor Hugo, datant de 1841 qui rappelle «La France et l’Allemagne sont essentiellement l’Europe. L’Allemagne est le cœur, la France est la tête. Le sentiment et la pensée, c’est tout l’homme civilisé. Il y a entre les deux peuples connexion intime, consanguinité incontestable. Ils sortent des mêmes sources ; ils ont lutté ensemble contre les Romains ; ils sont frères dans le passé, frères dans le présent, frères dans l’avenir.». En regard des drames traversés, c’est une européenne plus que convaincue qui montre le chemin.

Je retiendrai ces mots, à l’ouverture de son premier discours sous la Coupole du quai de Conti : «En effet, même si l’Académie française, dès sa naissance, a toujours diversifié son annuaire, jusqu’à, pensez donc, s’ouvrir à des femmes, elle demeure à mes yeux le temple de la langue française. Dans ce dernier bastion, elle épouse son temps, sans céder aux dérives de la mode et de la facilité, et, par exemple, n’est-ce pas Madame le Secrétaire perpétuel, sans donner dans le travers qui consiste à faire semblant de croire que la féminisation des mots est un accélérateur de parité.». Oui, la parité n’est pas qu’une question de vocabulaire et il reste beaucoup d’ouvrage sur le métier mais désormais féminité rime avec modernité et immortalité.
Un début ?

Discours de madame Simone Veil

Photos AFP, l’Express
(Archive du 19 mars 2010)
La vie...

Le dernier (très long) voyage d’Helmut Kohl

16 juin 2017. L’ex-chancelier allemand Helmut Kohl décède dans sa résidence de Ludwigshafen. Helmut Kohl c’est avant tout l’artisan de la réunification allemande. Attention, point info que ceux de moins de quarante ans risquent de ne pas connaître : durant la Guerre Froide (cf cours d’histoire des classes de premières), l’Allemagne est divisée en deux parties, la RFA (ouest) est créée le 23 mai 1949 avec pour siège administratif Bonn, tandis que la RDA (est) naît officiellement le 7 octobre de la même année avec Berlin-Est pour capitale. Il faudra attendre la chute du mur de Berlin (9 novembre 1989) pour que le processus de réunification aboutisse le 9 novembre 1990. Entre temps, le pays aura été déchiré, des familles séparées, Berlin divisée : RFA et RDA suivant des évolutions économiques bien différentes. Au passage, ne pas hésiter à revoir l’excellentissime Good bye Lenin de Wolfgang Becker, sorti en 2003. Helmut Kohl sera celui qui aura convaincu George H. W. Bush (le père), Mikhail Gorbatchev et François Mitterrand de participer au recollage de morceaux. Ainsi, on pensera à la poignée de main entre les président français et le chancelier allemand le 22 septembre 1984 à Douaumont. Un décès ne valant pas béatification, on n’oubliera pas le scandale des quelques millions de marks euros de la caisse noire de la CDU et la « trahison » d’une ambitieuse membre de son parti, une certaine Angela Merkel, qui en profite pour lui chiper sa place et lui succéder à la tête du parti.

Aujourd’hui, l’ex-chancelier repose en paix. Ou du moins essaie. Car, son décès le 16 juin a déjà donné lieu à un mini-psychodrame digne d’un soap made in USA (ici la minute people) entre la jeune veuve qui empêche la famille d’accéder à la dépouille moyennant chaînes sur l’entrée de la résidence et autres gentillesses du même acabit. Au plan international, on voit les choses en grand et le bon Helmut n’est toujours pas arrivé à sa dernière demeure. On a ainsi, « hommage européen oblige », organisé à la va-vite une méga commémoration king size avec ex et actuels chefs d’état, chefs de gouvernement, chancelière (la félonne entre temps solidement arrimée à son fauteuil) en exercice… Strasbourg va ainsi subir les désagréments avoir l’honneur d’accueillir, le temps d’une journée, Emmanuel Macron, Bill Clinton, Dmitri Medvedev, Benjamin Netanyahu et autres huiles internationales. Que ceux qui se souviennent du merdier du sommet de l’OTAN en 2009 lèvent la main car on en est pas très loin. Demandez le programme version 2017, cette fois pour une journée seulement (ouf) : autoroutes fermées, routes secondaires contrôlées, accès cyclistes et piétons règlementés dans certains quartiers, circulation des trams et bus limitée, 2000 policiers arrivés en renfort. Rien que du bonheur on vous dit.

Mais revenons à Helmut (parce qu’avec ce qu’il subit, on peut lui témoigner un peu de compassion) : reposer en paix donc. Depuis le 16 juin, il attend de partir vers sa dernière demeure. Attente légitime on lui accordera bien volontiers. Mais voilà, là où le commun des mortels fait appel à une entreprise spécialisée qui règle l’affaire rapidement et le guide tranquillement à sa dernière adresse, on offre à notre défunt un dernier voyage.
Ainsi les escales prévues ce samedi 1er juin :

  • le matin, transport du cercueil par la route à Strasbourg depuis Ludwigshafen (140 km aller),
  • 11h à 13h, « cérémonie de deuil européenne au Parlement Européen de Strasbourg » : cercueil couvert du drapeau européen et discours du président du Parlement, du président de la commission européenne, du résident du conseil européen, de l’ancien premier ministre espagnol, de la chancelière allemande (la traîtresse) et du président français,
  • 14h : retour à Ludwigshafen par hélicoptère de la police fédérale allemande (140 km retour), puis traversée de la ville en cortège de voitures,
  • 15h45, haie d’honneur pour installation du cercueil sur la bateau MS Mainz et départ pour Spire (30 km)
  • 16h30, haie d’honneur pour l’arrivée du convoi et défilé du corbillard,
  • 18h, requiem pontifical en la cathédrale
  • 19h45, grande escorte d’honneur devant la cathédrale
  • 20h45, inhumation « en présence de la famille et d’amis proches » (vu les rapports familiaux entre les enfants et la belle-mère ça promet…)

Bref, tout ça pour dire que depuis 2 semaines, l’ex chancelier aura eu le temps d’attendre d’être enfin un peu tranquille, après avoir été déplacé, convoyé, célébré, hélicoptérisé… « Reposer en paix » on disait ?